Champion de France 1961
S’il vous arrive un jour de croiser le chemin d’un de ceux qui ont eu à le fréquenter dans les pelotons des années cinquante et soixante, tous vous diront que Marcel De Crescenzo était un coureur de valeur.

Né le 7 Mars 1935 à La Calle, près de Bône (aujourd’hui Annaba) en Algérie, c’est à l’invite pressante d’un ami, qui le convainc que c’est en métropole qu’il pourra faire quelque chose dans le cyclisme, qu’il quitte le pays direction Paris.
Nous sommes en 1953, un an donc avant le déclenchement des terribles évènements qui aboutiront à la guerre. Il va se fixer en région parisienne, à Gennevilliers, non sans peine, devant même un temps coucher sous les ponts, tant les temps sont difficiles pour ce jeune pied-noir débarqué à Paris avec pour seuls viatiques une valise et les vêtements portés sur lui.
Heureusement, sa valeur cycliste ne va pas tarder à se faire connaître, et il rejoint les Jeunesses Populaires Sportives dès son arrivée. Il restera dans ce club dirigé par Roger Reynès jusqu’en 1958, avant de rejoindre les rangs de la Pédale Charentonnaise en 1959, où il terminera son parcours cycliste.
1m60 et 54 kilogs, voilà qui situerait notre homme dans la catégorie « grimpeurs ». Grimpeur, il le sera, mais pas seulement. Car ce coureur de poche excelle sur les routes, mais également sur les pistes. Cinq victoires sur route l’année de son arrivée en France, et, dès l’année suivante, il démontre ses talents d’américain en remportant à La Cipale l’américaine de Pâques avec Roger Picard.
Sur la route, il peut se targuer d’un Paris-Dreux en 1955, d’ une étape de la Route de France (Sarlat-Poitiers) et d’une troisième place au classement général la même année avant de remporter Paris-Cayeux l’année suivante.
Mais c’est à la Route de France, l’épreuve organisée par Jean Leulliot, sorte de « Tour de France des amateurs » qu’il « crève l’écran » Et la presse de s’enflammer en parlant à son sujet d’ «un nouvel Apo Lazaridès des courses à étapes »
Sur la piste, il est l’un des meilleurs amateurs de son époque : champion d’Ile-de- France, puis de France de poursuite olympique en 1954 sur la piste du Havre avec Brun, Ribeyre et Larcher, il remportera l’année suivante la Coupe de France de la spécialité au Vél’d’Hiv’ avec les mêmes coéquipiers.

En 1958, c’est la parenthèse service militaire, avant de reprendre le chemin des succès et des places d’honneur sur la route et sur les pistes dès l’année suivante, avec notamment une victoire d’étape dans le Tour d’Eure-et-Loir, une dans le Circuit de Boulogne-Billancourt en 1960 et sur piste, le Prix Coupry-Rollion la même année à La Cipale avec Albert Gasperini , et des places d’honneur en veux-tu en voilà notamment dans le Prix de la Boucherie et le championnat d’Ile De France sur route (second en 1960 et 1961) .
Excellent coureur d’américaine, son éclectisme devait l’amener un jour ou l’autre à faire l’expérience du demi-fond.
C’est son camarade André Retrain qui l’y amènera. Première course, première victoire, avec Alexis Blanc-Garin comme entraîneur, après seulement deux mois d’entraînement sur la piste du Parc des Princes, à raison d’une séquence par semaine ! Voilà qui pose quand même la valeur du monsieur. Dommage pour son camarade de club Antège Godelle, qui lui avait dit avant la finale de Dijon : « Cette année, j’ai une chance d’être champion de France. Alors, ne vient pas me faire ch… ! »
Au championnat du Monde, ce néophyte de vingt-six ans se révèlera plutôt à la hauteur, en terminant troisième de sa série. En repêchage, il échoue de peu à accéder à la finale, en terminant second. Pas mal pour un débutant...
Las, les pistes de France et d’Europe n’auront pas l’occasion de le revoir davantage en action : Marcel De Crescenzo arrêtera la compétition dès l’année suivante, pour le bon motif, en unissant son existence à une jolie languedocienne avec qui il partage toujours sa vie à ce jour dans un petit village proche de Montpellier.
Aujourd’hui que pense Marcel De Crescenzo de cette bien brève escapade au pays du derrière motos ?
Quand on l’interroge à ce sujet, il vous répondra que ce championnat de France, remporté comme ça, presqu’au débotté, reste pour lui un bon souvenir, auquel s’ajoute la fierté d’avoir porté le maillot tricolore.

Patrick Police, pour STAYER FR le 6 Septembre 2019 - transféré sur STAYER FRANCE le 30 Juillet 2020


