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Le 30 Septembre 1933, le quotidien sportif « L’Auto » annonce que le stayer marseillais Aimé Constant « a l’intention d’effectuer sur l’autodrome de Montlhéry une tentative contre le record de l’heure de Léon Vanderstuyft ».
Particularité : en cette année 1933 où l’on se bouscule sur l’autodrome, entre les tentatives d’Alexis Blanc-Garin contre le même record, les essais du « super vélo-car » de Charles Mochet,
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et ceux du Vélodyne de Marcel Berthet : « cette tentative sera effectuée derrière une voiture » (sans plus de précisions) « pilotée par Vernet ».
Sur la base de ces faibles indices, il convenait de mener l’enquête, en savoir un peu plus sur les protagonistes de l’affaire, et identifier le mystérieux véhicule.
Mais commençons donc par évoquer ce fameux record. Il s’agit bien sûr de celui du Belge Léon Vanderstuyft. Sa fameuse marque de 122.771 kilomètres sur l’heure, actée le 29 Septembre 1928, est le Graal des apprentis recordmen.
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Pour battre ce record, deux options : l’entraînement derrière automobile, ou celui derrière motocyclette.
Les essais de Jules Miquel, puis de Vanderstuyft derrière automobile Talbot à Montlhéry, et enfin ceux de Gustave Ganay dans le sillage d’une monstrueuse Voisin à Miramas se sont révélés des impasses.
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L’entraînement derrière moto, lui, a été crédibilisé par les records successifs de Vanderstuyft et Brunier, réalisés en rafales entre 1924 et 1925.
Pourtant, c’est dans l’abri d’une voiture de course que Constant choisira de se lancer à l’assaut du record à l'automne 1933.
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Il veut faire fi des désavantages nés du défaut d’alignement dans l’inclinaison des virages et du phénomène de fouettement des roues à vitesse élevée, pièges rédhibitoires du derrière auto.
Aimé Constant, le stayer marseillais, n’émarge pas au même registre de valeur que celui de son glorieux prédécesseur et « pays », Gustave Ganay, tragiquement disparu en 1926.
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C'est un stayer de "second rideau" qui s’est constitué l’année d’avant un petit nom à l’ombre des géants du demi-fond que sont Paillard, Grassin et Lacquehay à l’occasion d’un chassé-croisé de records sur la piste du Parc des Princes avec le stayer britannique Harry Grant. En Octobre 1932, derrière l'entraîneur Daniel Lavalade, en soirée, il porte la marque du record derrière motos avec rouleau à 0.60 m de 89 k 121 à 89.545 km dans l'heure, accomplissant les 100 km en 1 h 10' 5" 2/5 (record du monde également)
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Décrocher un titre exotique ou un record insolite est une publicité gage de contrats sur la piste des Parc des Princes.
Or, en ce millésime 1933, en forêt de Saint-Germain, le prestigieux « Bol d’Or « automobile a été remporté par une voiture française, une Salmson, pilotée par Just-Emile Vernet.
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Né en juin 1894, Just-Emile Vernet, mobilisé en 1914, devient sergent-mécanicien dans une escadrille, expérience qui va modifier définitivement le cours de son existence. Démobilisé en 1919, il va dédier cette dernière à la mécanique. En 1928, il acquiert une Salmson qu'il transforme en monoplace : nous y voilà ! Avec cette voiture il participera à de nombreux Grand-Prix: Saint-Gaudens,
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le Bol d'Or et même deux fois les 24 heures du Mans. La voiture est une Salmson Grand Sport Special numéro de série 102, 1100cm3 de cylindrée, double-arbre à came en tête et surtout moteur type San-Sebastian c'est à dire avec double-allumage. A cette date cette voiture existe toujours chez un collectionneur suisse. C'est sur cette même voiture qu'il aidera Constant à battre le record sur l'anneau de Montlhery.
Le stayer marseillais au printemps avait bien envisagé de s'essayer derrière une Bugatti 3 l 8, projet sans suite.
Las, même cette bête de course, et ce « volant » de grande classe ne permettront pas à Constant, de dépasser la marque de Vanderstuyft. Le Jeudi 12 octobre, le stayer marseillais atteindra péniblement les 101km/h. Quelle déception, alors que la Salmson est capable de tutoyer les 160 ! La faute probablement à la résistance à l’avancement offert par son coupe-vent monumental.
Quoiqu’il en soit, Aimé Constant abandonnera l’option « derrière auto » définitivement. Ne resteront pour l’histoire que ces quelques photos que je livre à votre émerveillement.
L’année suivante, Aimé Constant reviendra sur le ciment de l’autodrome. Cette fois derrière la moto spéciale de Rody Lehmann qui persistera à ne pas lui rendre les services attendus.
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Au bout de l'aventure, une succession d’incidents mécaniques, tant pendant les essais réalisés pendant la deuxième semaine d’ Octobre, et deux bonnes "gamelles" à la clef sur l'abrasif ciment de l'anneau de vitesse.
Le samedi 13 Octobre, à 8 heures du matin, lancé par Lucien Choury, Aimé Constant arrache les 17 mètres de braquet de son vélo à pignon fixe équipé d'un changement de vitesses Caminade, il culbute d'abord les records du monde.
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Ceux des 5 km (3' 1" -99.378 km/h), 10 km (5' 29" 1/5 - 109.356 km/h) et 20 km (10 18" - 116.505 km/h) ,effectuant un tour à 125.698 km/h, avant de devoir tout arrêter, le vent soufflant de plus en plus violemment sur le plateau de Saint-Eutrope, l'arrachant littéralement du rouleau de la moto de Lehman.
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Las. Après vérification dans le maquis de l'histoire des records derrière grosses motos "règlement libre" non reconnus ni par l'U.C.I. ni par l'U.V.F. on extirpera des archives des records supérieurs établis par Leo Vanderstuyft lors d'une des tentatives effectuées en 1928.
Et Aimé Constant ne conservera ainsi que le dérisoire record du tour de piste. Quand ça ne veut pas rigoler…
En 1935 il remet pourtant ça, dès la fin du mois d'Août, pour re-tâter du derrière voiture, cette fois une Amilcar avec coupe-vent, avant de revenir plus sagement au derrière moto et de pousser son 43 x 6 derrière l'engin du dernier record de l'heure établi à l'automne 1925 par Jean Brunier, soutenu par la firme Delangle.
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Des semaines durant, il hantera l'autodrome, en vain.
Dégoûté de la chasse aux records, Aimé Constant restera toutefois dans le monde du demi-fond, et ce jusqu’à son dernier souffle.
Entraîneur après-guerre, notamment du bon stayer que fut Robert Rodriguez, il trouvera la mort sur la piste du stade-vélodrome de Marseille, le 18 Juin 1963, lors d’une épreuve de demi-fond.
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Le vélodrome de Vitrolles perpétue sa mémoire.
Et ce petit article est un bon moyen pour la raviver et célébrer son souvenir en rappelant la démarche originale et obstinée qui fut la sienne.
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Appendice :
Just-Emile Vernet est né en juin 1894 dans l'Est de la France à proximité de Besançon. Mobilisé en 1914, il devient sergent-mécanicien dans une escadrille ce qui va modifier définitivement le cours de sa vie. Démobilisé en 1919 il consacre alors sa vie à la mécanique.
En 1928 il acquiert une Salmson qu'il transforme en monoplace, avec cette voiture il participera à de nombreux Grand-Prix: Saint-Gaudens, le Bol d'Or et même deux fois les 24 heures du mans. C'est sur cette même voiture qu'il aidera Constant à battre le record sur l'anneau de Montlhery.
La voiture est une Salmson Grand Sport Special numéro de série 102, 1100cm3 de cylindrée, double-arbre à came en tête et surtout moteur type San-Sebastian c'est à dire avec double-allumage.
A date cette voiture existe toujours chez un collectionneur suisse.
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Sources :
- Documentation Mathieu Gras
- Livre "La fabuleuse histoire du cyclisme sur l'autodrome de Montlhéry" de Patrick Police
- Livre " Le Grand Livre des Vélodromes Français "de Gilles Ardin
- Apports documentaires et historiques Philippe Hébert
- L'Intransigeant; Sporting; l'Auto; Le Radical de Marseille; Paris Soir
Patrick Police, pour STAYER FRANCE
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